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Jacques Villeglé ( 1926 - )

Jacques Mahé de La Villeglé, dit Jacques Villeglé, dit également Villeglé, plasticien français né à Quimper en 1926.

Membre des Nouveaux Réalistes, il s'est imposé avant tout comme « collecteur » d'affiches lacérées et théoricien de ce type d'appropriation.

Jacques Villeglé étudie la peinture et le dessin à l'école des Beaux-Arts de Rennes où il fait la connaissance de Raymond Hains (1945), à qui le liera une complicité définitive.
Il travaille quelque temps chez un architecte, où il se familiarise avec les questions d'urbanisme et d'espace public, avant d'étudier l'architecture à l'école des Beaux-arts de Nantes (janvier 1947-décembre 1949).

Dès 1947, il commence à récolter à Saint-Malo des débris du mur de l'Atlantique et des fers tordus, qu'il regarde comme des sculptures.
À partir de décembre 1949, il limite son comportement appropriatif aux seules affiches lacérées. Pour lui, le véritable artiste est le « lacérateur anonyme », la collecte pouvant être effectuée par n'importe qui : il annonce ainsi le moment de la disparition de la figure de l'artiste, cédant la place au « collecteur » ou collectionneur.

« Le prélèvement, dit-il, est le parallèle du cadrage du photographe », et lui-même se veut, comme Hains, simple collecteur de fragments qu'il ne fait que choisir et signer.

En 1958, il rédige une mise au point sur les affiches lacérées intitulée Des Réalités collectives, préfiguration du manifeste du Nouveau réalisme ; il est considéré comme l'historien du Lacéré anonyme, entité qu'il crée en 1959. En collaboration avec Raymond Hains, il réalise quelques films ainsi que Hépérile éclaté (publié en juin 1953), déformation photographique d'un poème phonétique de Camille Bryen, rendu illisible à travers l'objectif à trame cannelée de son partenaire.

En février 1954, Villeglé et Hains font la connaissance du poète lettriste François Dufrêne, lui-même précurseur dans le domaine du travail sur les affiches lacérées dont il interroge l'envers (les « dessous »). Il les présente à Yves Klein, puis Pierre Restany et Jean Tinguely. Après leur participation commune à la première Biennale de Paris, ils constituent en 1960 le groupe des Nouveaux réalistes.

Releveur de traces de civilisation, plus particulièrement lorsqu'elles sont anonymes, Villeglé imagine à partir de 1969 un « alphabet socio-politique » en hommage à Serge Tchakhotine, auteur en 1939 d'un essai intitulé Le Viol des foules par la propagande.

Depuis 1957, l'œuvre sélective de Villeglé a fait l'objet de plus de 140 expositions personnelles en Europe et en Amérique, et l'artiste a participé à des manifestations collectives dans les cinq continents. Ses œuvres ont été acquises par les plus importants musées européens, américains et africains. Pourtant, en dépit du caractère novateur de sa démarche, le succès public a été long à venir.

Ce n'est qu'à partir de la fin des années 1970 que Villeglé a pu vivre de son art, et il a fallu attendre 1998 pour que le musée national d'Art moderne fasse l'acquisition d'une de ses affiches lacérées.

Le critique et romancier Bernard Lamarche-Vadel et la biographe de Roger Caillois, Odile Felgine, lui ont consacré des monographies en 1990 et en 2001, l'une éditée par Marval, l'autre par Ides et Calendes.


Déclarations:

  • « La lacération représente pour moi ce geste primaire, c'est une guérilla des images et des signes. D'un geste rageur, le passant anonyme détourne le message et ouvre un nouvel espace de liberté. Pour moi, les affiches lacérées rapprochaient l'art de la vie et annonçaient la fin de la peinture de transposition… » (Jacques Villeglé)
  • « Être le témoin actif d'une humanité riche en contradictions est une de mes ambitions. C'est l'anonyme de la rue qui intervient sur les reflets de la culture dominante... Je passe après. » (Jacques Villeglé)
  • « Jacques Villeglé est de ceux pour qui le monde de la rue est un tableau permanent. » (Pierre Restany)

Interview par Philippe Dagen (septembre 2008)

  • Après la guerre, j'ai appris que l'avant-garde avait pris fin en 1924, après le Manifeste du surréalisme, et que la typographie des affiches avait inspiré Mallarmé pour son poème Jamais un coup de dé n'abolira le hasard. Et que Braque avait introduit des lettres en 1912 dans son tableau, Le Portugais. Nous nous sommes placés dans l'esprit de ces avant-gardes - mais en s'en différenciant par un nouveau comportement, celui qui se voit aussi bien dans les machines de Tinguely que dans les monochromes d'Yves Klein : ne plus faire de peinture.
  • Comment choisissiez-vous les affiches ?
    Au début, c'était surtout en raison des lettres, à cause de leur présence dans le cubisme et de mon intérêt pour la typographie. J'avais la conviction que les lettres donnaient une structure - et puis, simplement, c'était mon goût. Puis j'ai commencé à choisir des choses qui m'agressaient. Je me suis aperçu que l'artiste pouvait trouver son inspiration dans ce qui semblait laid aux autres. Je me souviens d'une affiche où il y avait beaucoup d'orange. Quand je l'ai prise, je me suis dit qu'elle était horrible et que je ne pourrais rien en faire. A l'atelier, avec le recul, j'ai vu que j'avais eu raison de la prendre... Vous savez, ce sont des décisions très rapides. Mauriac disait écrire de façon somnambulique. Etait-ce pareil pour moi ? Je n'avais pas le temps de méditer, j'étais dans la rue, il fallait que ça aille vite, comme un photographe, en un quart de seconde.
  • Interveniez-vous sur les affiches après les avoir arrachées ?
    Je ne les touchais pas, par principe. Il m'est arrivé d'arracher un morceau pour éviter qu'une marque ou le visage d'un homme politique soit trop visible. Dans mes dernières lacérations, les affiches de rappeurs, c'est l'inverse : j'ai laissé les noms lisibles, pour conserver la poésie de l'époque. Les affiches racontent bien la vie, - et en même temps ce sont des formes et des couleurs "en un certain ordre assemblées", comme disait Maurice Denis.
  • Elles parlent de politique?
    Comment n'en parleraient-elles pas ? Longtemps, la politique a été une affaire d'affiches. Cela étant, je suis un apathique politique, né dans une famille de droite, vivant dans un milieu de gauche. Par rapport à Rancillac, qui est un militant, je ne suis pas un artiste engagé. Je suis un regardeur. Je veux juste la paix sociale .
  • Comment les premières lacérations ont-elles été reçues ?
    La première Biennale de Paris, en 1959, nous a rejetés. En 1961, la situation avait changé. On m'a confié un mur de 31 m de long. Je me suis demandé comment faire avec cette longueur. Mon ami Dufrêne m'apprend alors qu'une palissade vient d'être décroûtée à Montparnasse. Tout était sur le trottoir. On a pris trois taxis et tout ramassé : le travail était fait. Je n'ai eu qu'à mettre au mur.

Principales expositions personnelles :


Galerie Virtuelle


Chaussée des Corsaires - fils d'acier (1947)

Jazzmen (1961)

1962

Rue du Temple (1965)

Prenez vos désirs... (1968)

Métro Belleville (hommage à Combas) 1998

ABC (1959)

Rue Jean (1965)

Pour le succès de la France (1965)

Rue Saint-Denis (1976)

Projet "éléphants" (1989)

Métro Jourdain (1990)

Monnaies (2006)

Tapis Maillot (1959)

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