L'Armée

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L'Armée , film japonais de Keisuke Kinoshita, sorti en 1944

Analyse critique

Ce film est une commande de l'armée japonaise. Le principe initial du film est d’illustrer le parcours de l’armée nippone au cours de l’histoire. On dispose ainsi par saut de puce d’un montage historique. Les séquences mettent en situation les personnages d’une même famille au fil des diverses époques lors des glorieuses avancées du Japon vers l'impérialisme obtus. Tout cela avec le savoir-faire de Kinoshita en matière de placement de caméra. Même si plus on arrive vers la Seconde Guerre mondiale, plus le discours devient artificiel tant il paraît forcé.

Dans un film de propagande comme celui-ci, il faut du génie pour à la fois respecter le cahier des charges imposé par les donneurs d’ordre, mais surtout détourner astucieusement la finalité première d’un tel exercice pour y placer au compte goutte des touches plus personnelles, des notes subtiles qui fleurtent avec la censure. Par exemple une mère y est montrée angoissée à l’idée de voir si son fils revient de la guerre avec les compagnons de son régiment, alors que tout au long du film, on explique avec force combien les parents doivent se montrer fiers de l’embrigadement de leurs enfants et occulter toutes considérations personnelles susceptibles de ne pas faire honneur à l’Empereur.

Plus surprenant, Kinoshita, aidé par des acteurs de génie, parvient aussi à apporter pas mal de notes d’humour. Un certain nombre de séquences opposent deux pères voyant leur fils enrôlé dans l’armée au même moment mais assignés à des missions différentes. Le dilemme humoristique, et même satirique, est alors d’accepter de voir son fils partir là où c’est le plus honorable pour un soldat; ce qui finit par ridiculiser en filigrane les prétentions suicidaires et aveugles que la propagande espérerait voir se démocratiser dans l’attitude du bon Japonais.

Une séquence, vers la fin, où la petite famille se retrouve pour la dernière fois autour d’un repas avant le départ du fils est très représentative : tous les dialogues sentent bon le moralisme va-t-en-guerre, mais à cet instant les images semblent se séparer du discours, et ce qui y est dit n’a plus d’importance, seule compte la situation tendue représentée.
Le visage de chacun dit leur tristesse de se savoir là pour la dernière fois, et le plaisir malgré tout de pouvoir savourer un dernier instant en commun. Pour illustrer cette paix familiale appelée à disparaître, les enfants se mettent à masser leurs parents. Ce sont alors les images qui parlent, les visages faussement joyeux, plus que les paroles niaises. Déjà, pas de grandes effusions stupides, mais une larme discrètement séchée par une Kinuyo Tanaka tête baissée, sourire de circonstance aux lèvres.

Distribution

1re génération

  • Chishū Ryū : Tomosuke Takagi
  • Jun Yokoyama : Tomonojo Takagi, son fils (jeune)
  • Yasumi Hara : Takeuchi, le soldat

2e génération

  • Ken Mitsuda : Tomonojo Takagi (âgé)
  • Haruko Sugimura : Setsu, sa femme
  • Toshio Yamazaki : Tomohiko, leur fils (jeune)

3e génération

  • Chishū Ryū : Tomohiko Takagi (âgé)
  • Kinuyo Tanaka : Waka, sa femme
  • Kazumasa Hoshino : Shintaro, leur fils aîné
  • Eijirō Tōno : Tsunesaburō Sakuragi

Fiche technique

  • Titre original : 陸軍, Rikugun
  • Réalisation : Keisuke Kinoshita
  • Scénario : Shōhei Hino et Tadao Ikeda
  • Photographie : Yoshio Taketomi
  • Société de production : Shôchiku
  • Durée : 87 minutes
  • Date de sortie : 7 décembre 1944


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