La Rumeur

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La Rumeur (The Children’s Hour) film américain réalisé par William Wyler et sorti en 1961 .

Analyse critique

Dans une région huppée des États-Unis, Karen et Martha, deux amies de longue date (elles se sont connues lors de leurs études), réussissent, après des débuts difficiles, à rentabiliser leur pensionnat privé pour filles. Karen est fiancée au docteur Joe Cardin dont Martha est un peu jalouse. Les deux directrices surprennent fréquemment une de leurs petites pensionnaires, Mary Tilford, en train de mentir effrontément. Punie, et irritée contre ses professeurs, la fillette, soutenue par l’une de ses compagnes de chambrée, Rosalie, sur laquelle elle exerce un chantage après avoir découvert la kleptomanie de celle-ci, raconte à sa richissime grand-mère Amelia Tilford qu’elle a vu les deux directrices avoir des rapports inavouables. Comme une trainée de poudre, tous les parents retirent leurs enfants du pensionnat aussitôt déserté.

Après un procès perdu, les deux jeunes femmes, dont la réputation est désormais détruite, sont encore confrontées à d’autres épreuves : le doute s’est installé dans l’esprit du fiancé de Karen et leurs fiançailles sont rompues tandis que Karen et Martha font l’objet d’un voyeurisme constant de la part de la gent masculine du coin. Dans leur isolement et sous cette pression, Martha commence à perdre pied et avoue à Karen qu’elle pense lui porter réellement depuis toujours cet amour interdit dont elles ont été accusées. Après que les mensonges de la fillette responsable de la rumeur ont été fortuitement découverts par sa mère et que sa grand-mère soit venue faire amende honorable, Martha se suicide après s'être culpabilisée. Karen mesure alors l’indéfectible affection que lui vouait son amie et réalise qu’elle aussi l’aimait sans doute plus que de raison. Après les obsèques et sans un regard pour ceux qui ont brisé son existence et celle de son amie, Karen s’en va sur les chemins avec de nouvelles vues sur le monde.

Ce film a été occulté depuis ses premières exploitations avec des critiques le qualifiant d’empesé et de démonstratif. Ce film est la deuxième adaptation de la même pièce de Lillian Hellman (après Ils étaient trois en 1936, toujours de Wyler.

Ce film en noir et blanc se déroule quasiment en intérieurs, ce qui confère une certaine austérité à une histoire déjà difficile à traiter . Mais l’action est constamment relancée par maints ressorts dramatiques en évitant manichéisme et grands numéros mélodramatiques d’acteurs qu’il aurait été tentant de déployer. Il y a beaucoup de gestes esquissés, de regards intenses et amoureux jamais explicités par des dialogues. Par moment, le film a des fulgurances de Nouvelle vague comme la scène de la révélation dans la voiture d’Amelia Tilford ou les gros plans hachés de Karen. La séquence du choc de « l’explication », où Karen est abasourdie et Martha interrogative, la première à l’extérieur et la seconde à l’intérieur, est une scène entièrement muette où les plans fixes rappellent ceux d’Antonioni dans son film La Nuit sorti au début de la même année. La réalisation et l’atmosphère sont plus british qu’américaines.

À part Miriam Hopkins, qui reste hollywoodienne dans la composition de son personnage décalé, les actrices ont été justement appréciées. Bien sûr, en première ligne, Hepburn et MacLaine sont constamment remarquables mais il faut également mentionner la performance de Fay Bainter, sobrement Actors Studio. Quant aux gamines, on pourra préférer le jeu retenu de la britannique Veronica Cartwright alias « Rosalie » à celui, très ostentatoire, de Karen Balkin, la « méchante Mary. »

Ce film tranche, par son ambigüité, sur la production américaine de l'époque. L'homosexualité féminine, même seulement esquissée, est bien au centre du propos. La méchanceté des enfants, en particulier Mary, est très inhabituelle. Malgré leur bonne foi, les deux femmes perdent leur procès, ce qui donne une idée très partiale et conservatrice de la justice locale. Enfin le happy end n'est pas au rendez vous, le suicide de Martha et la séparation définitive entre Karen et Joe fournissent une conclusion très sombre.

Shirley MacLaine, dans des mémoires, considère que l’œuvre de Lillian Hellman a été trahie par le réalisateur William Wyler qui pris de panique à l’idée d’avoir traité une histoire de lesbiennes, coupa toutes les scènes où l’on sentait l’amour de Martha pour Karen, par exemple quand elle repassait amoureusement ses vêtements, lui brossait les cheveux ou lui confectionnait des petits plats. La plupart de ces scènes ont été restituées dans la version ressortie en France en 2009.

Distribution

  • Audrey Hepburn : Karen Wright
  • Shirley MacLaine : Martha Dobie
  • James Garner : le docteur Joe Cardin
  • Miriam Hopkins : Lily Mortar, la tante de Martha
  • Fay Bainter : Amelia Tilford
  • Karen Balkin : Mary Tilford
  • Veronica Cartwright : Rosalie
  • Sally Brophy : la mère de Rosalie
  • Mimi Gibson : Evelyn
  • Jered Barclay : le livreur

Fiche technique

  • Titre français : La Rumeur
  • Titre d’origine : The Children’s Hour
  • Réalisation : William Wyler
  • Scénario : John Michael Hayes d’après la pièce de Lillian Hellman The Children’s Hour
  • Adaptation : Lillian Hellman
  • Musique originale: Alex North
  • Direction de la photographie : Franz F. Planer
  • Direction artistique : Fernando Carrere
  • Montage : Robert Swink
  • Pays d'origine : Modèle:États-Unis
  • Producteur : William Wyler
  • Producteur associé : Robert Wyler
  • Société de production : Mirisch Corporation
  • Format : noir et blanc — son monophonique
  • Durée : 103 minutes
  • Dates de sortie : 19 décembre 1961 aux États-Unis
    • juillet 2009 nouvelle sortie France
  • 5 Nominations aux Oscars 1962


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