Sergent York

De Wiki de A à Z.

Version du 15 juillet 2014 à 19:20 par Zawiki (discuter | contributions)
(diff) ← Version précédente | Voir la version courante (diff) | Version suivante → (diff)

Sergent York (Sergeant York) film américain réalisé par Howard Hawks, et sorti en 1941.

Analyse critique

Le film relate l'histoire vraie d'Alvin Cullum York, un jeune paysan du Tennessee, buveur et bagarreur, qui, à la suite d’une illumination, découvre la foi et se convertit au pacifisme. En 1917, alors que les États-Unis entrent dans la Grande Guerre, York est mobilisé et, en dépit de ses convictions, participe en France à l’offensive du front de l’Argonne. L'histoire du film commence aussitôt après, en 1919, Jesse Lasky, producteur de cinéma observe depuis son bureau la Cinquième Avenue qui célébre le retour au pays du héros Alvin York. En quête perpétuelle de projets, il est extrêmement sensible à l’élan populaire qui entoure Alvin York et imagine déjà le succès du film qui lui serait consacré. Lasky essaie donc de prendre contact avec York afin de lui proposer un long métrage où il interpréterait son propre personnage. Mais, fidèle à son engagement religieux et persuadé que ses actes n’ont rien de glorieux, York souhaite consacrer son temps à sa paroisse. Il refuse catégoriquement l’idée de Lasky. En 1940, Jesse Lasky décide de relancer le projet ‘York’ et part à la rencontre de l’ancien Sergent. Alvin York a fondé une école d’enseignement biblique et maintient son désintérêt pour le cinéma. Le producteur lui explique alors, qu’en cas de succès du film, son personnage suscitera l’empathie et confortera la position alors défendue par les Démocrates, l’engagement de l’armée US dans le second conflit mondial. Fervent partisan de l’intervention américaine et en quête de fonds pour son école, York finit par accepter le projet sous certaines conditions, l’une d’entre elles étant que Gary Cooper tienne le rôle titre.

Jesse Lasky s'adresse aux frères Warner. Conscient du potentiel commercial du film et fervent partisan de l’engagement américain contre les force nazies, Jack Warner accueille favorablement le projet de Jesse Lasky. Financé par la Warner et doté d’un budget conséquent, Sergent York a bénéficié de tout le savoir-faire de la Compagnie. Techniquement, le travail est irréprochable : la précision du cadrage, la qualité de la photographie, l’efficacité du montage ou la richesse des décors imposent ce style Warner où profusion des éléments rime avec efficacité de la narration. Le film est scindé en deux. La première partie prend la forme d’une comédie dramatique décrivant la vie quotidienne d’Alvin York : issu d’une famille modeste, le jeune homme cultive un sol aride et subvient avec difficultés aux besoins de son foyer. Il rêve d’une terre plus riche et partage son temps entre beuveries et concours de tirs. Il n’est alors jamais question de batailles ni de quelconques exploits mais des doutes qui assaillent York. Le charme du héros, source d’une grande empathie, pose les bases de la suite du récit.

La seconde partie du film, consacrée à la guerre et aux exploits de York, laisse place à l’action et offre notamment des scènes de batailles remarquablement mises en scène. Tournées dans le célèbre ranch Warner, ces prises de vue proposent un spectacle impressionnant. Tandis que les explosions se succèdent, Hawks et son équipe filment le mouvement des hommes tentant en vain d’avancer vers les lignes ennemies. La direction des figurants, le souci permanent du cadre, ainsi qu’une grande profondeur de champ, multiplient le nombre de protagonistes présents à l’écran et densifient l’action. La fluidité des mouvements de caméra, superbes travelling latéraux en contre-plongée, ainsi que le montage serré concourent également à insuffler une grande énergie lors de ces séquences.

Howard Hawks avait déjà abordé le sujet de la guerre avec Les Chemins de la gloire, l’un de ses films les plus sombres où son style transparaissait dans chacun des plans. Avec Sergent York, l’approche est fondamentalement différente : ici Hawks et le studio n’ont pas comme objectif de dénoncer la guerre mais de décrire un héros susceptible de fasciner le public. Au début du récit, il est vrai que le Sergent n’est pas un personnage purement ‘hawksien’. Prisonnier de la personnalité naïve d’Alvin York à laquelle il doit rester fidèle Hawks ne peut prendre beaucoup de libertés. Mais, dès lors qu’il intègre l’armée, son personnage fait preuve d’un grand professionnalisme, s’insère parfaitement au groupe, devient un ‘chasseur ultime’ et, d’une certaine manière, enfile enfin l’armure ‘hawksienne’

Par ailleurs, sa maladresse avec les femmes renvoie à celle de nombreux mâles ‘hawksien’ tels que Cary Grant (L’Impossible Monsieur Bébé ou Allez coucher ailleurs), ou John Wayne (Rio Bravo, Hatari, La Rivière rouge). Mais le personnage féminin manque cruellement de la forte personnalité des héroïnes habituelles de Hawks, néanmoins, le film regorge de scènes où l’humour du réalisateur est reconnaissable. Ainsi, le concours de chasse à la dinde est un pur bijou de comédie et évoque évidemment la scène de l’arbre aux singes d’Hatari. Par ailleurs, on retrouve d’autres figures typiques de son style, notamment lorsque l’un des meilleurs camarades du Sergent meurt sur le champ de bataille. Ici, de nombreux réalisateurs auraient traité la séquence sur un ton mélodramatique. Chez Howard Hawks, York est révolté par la mort de son ami mais repart immédiatement à l’action. La nostalgie, la compassion, le sentimentalisme n’ont pas leur place dans son cinéma .

Gary Cooper est considéré en 1940 comme l’une des plus grandes stars du cinéma. Républicain de cœur mais partisan de l’intervention des ‘boys’ en Europe, Cooper endosse l’uniforme du Sergent York. Sa prestation lui vaut encore beaucoup de louanges,car incarner Alvin York ne se résume pas à jouer les héros sur un champ de bataille. Le film a pour objectif de montrer l’évolution d’un homme considéré d’abord comme un vulgaire renégat, puis comme un fervent chrétien, un objecteur de conscience et enfin un soldat exemplaire. Pour ce faire, Cooper interprète ces différentes facettes du personnage avec le plus grand naturel. Il se montre notamment capable d’incarner la naïveté de York sans jamais tomber dans le moindre cabotinage. Pendant toute la première partie du film, il joue énormément avec son corps et donne l’impression d’être handicapé par sa grande carcasse. Même lors de la séance de tir dans le camp militaire, il semble mal à l’aise, en retrait, sur la défensive. Au final, ce n’est que lorsqu’il est en contact avec l’adversité qu’il devient déterminé. Sur le champ de bataille, regard à l’affut, corps déployé, il prend l’allure d’un fauve lâché dans l’arène.

En 2008, le film est rentré dans le National Film Registry pour conservation à la Bibliothèque du Congrès aux États-Unis.

« Sergent York est une apologie du mariage, du travail et donc de l’engagement. Hawks, sans triomphalisme ni trompette, signe surtout une sublime déclaration d’amour aux racines de son pays. Hawks aime la poussière et les odeurs de bétail, cette Amérique lointaine, isolée des grandes villes. Il filme avec tendresse les sillons dans les champs, les concours de tir à la carabine, les petits bars où l’on se bastonne le samedi soir au rythme d’un piano désaccordé et les églises de bois où l’on chante le dimanche matin. » Adrien Gombeaud, Les Échos, 12 décembre 2007

Distribution

  • Gary Cooper : Alvin C. York
  • Walter Brennan : le pasteur Rosie Pile
  • Joan Leslie : Gracie Williams
  • George Tobias : "Pusher" Ross
  • Stanley Ridges : Major Buxton
  • Margaret Wycherly : Mrs York
  • Ward Bond : Ike Botkin
  • Dickie Moore : George York
  • Russell Hicks : Le général
  • Joe Sawyer : Sergent Early
  • Howard Da Silva : Lem
  • June Lockhart : Rosie York

Fiche technique

  • Titre : Sergent York
  • Titre original : Sergeant York
  • Réalisation : Howard Hawks
  • Scénario : John Huston, Abem Finkel et Harry Chandlee
  • Photographie : Sol Polito et (séquences de bataille) Arthur Edeson
  • Musique : Max Steiner
  • Montage : William Holmes
  • Société de production : Warner Bros.
  • Producteurs : Howard Hawks, Jesse L. Lasky et Hal B. Wallis
  • Durée : 134 minutes
  • Dates de sortie  : 2 juillet 1941 (New-York)
    • France : 4 avril 1945


Retrouvez tous les détails techniques sur la fiche IMDB

Outils personnels

Voir aussi les films d' Ann ; le cinéma de Nezumi; les Artistes contemporains / Randonnées dans les Pyrénées

Voyages : les merveilles du Japon; Les temples et des montagnes du Népal