Une fille dans chaque port

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Une fille dans chaque port (A Girl in Every Port) film muet américain réalisé par Howard Hawks, sorti en 1928

Analyse critique

La première séquence se déroule à Amsterdam où Spike le marin tient un relevé très précis des filles visitées dans chaque port. Mais à chaque fois que le marin Spike séduit une fille dans un port, un tatouage ou un bijou lui apprend qu’un certain Bill l’a devancé. Ils se rencontrent, se battent, puis deviennent inséparables, jusqu’au jour où une nouvelle conquête de Spike semble vouloir mettre fin à cette longue amitié.

L’amitié masculine est le thème central du film, la condition de marin n'est qu'un prétexte, puisque la quasi totalité du film se passe à terre. Les deux hommes se jaugent, serrent les poings et finissent par se cogner pour ensuite se serrer dans les bras, et bien sûr se recogner dès que possible. On trouve dans ce film ce qui fera l’essence de Hawks ensuite, un défoulement du corps, le coup de poing sympathique. Dans ce film muet, on , trouve toute une déclinaison de rires, de sourires grinçants ou pas, des démonstrations de gestes malheureux ou chaleureux, qui apparaissent toujours en un éclair.

L’expression des visages dans ce film est vecteur d’euphorie et de plénitude, la camaraderie est bue à sa source, dans les brimades et les tapotages d’épaule. Quand Spike découvre qu'il a été devancé, quel spectacle de voir se tendre son sourire, qui aussitôt va passer à l’amertume, et qui plus loin va se distordre dans un mugissement sans fin.

De grands moments de comédie existent dans ce film comme quand Spike et Bill cherchent un endroit de la ville sans policier pour se battre, étant chaque fois arrêté dans leurs élans brutaux, tombent dans l’eau du port, se battent dans l’eau et remontent main dans la main, pour partager l’une des dernières cigarettes non entamées par l’eau. Le film déborde d’énergie, de présence humaine brute. Il y a d’abord Spike le marin, immense carcasse à la mâchoire d’alligator qui aligne ses adversaires au sol en quelques mouvements enjoués ; puis Bill, l’alter ego, petit et provocateur, au milieu de toute une galerie de personnages plus typiques les uns que les autres. Ces gueules préfigurent le style caractéristique de certains films d'Hawks à venir, où trouvera sa place Walter Brennan.

Ce film est un objet vivant, brillant, qui chaloupe avec décontraction entre des bagarres de matelots et les gestes d’une entraide authentique. Il y a une puissance sexuelle, un jeu entre le film et le spectateur, définitivement annoncé avec l’arrivée de Louise Brooks en Mam’selle Godiva, une curiosité en latex qui effectue des plongeons devant la foule d’un cirque. C’est d’ailleurs la présence de Louise Brooks dans ce film qui décidera Pabst pour son film Pandora’s box. L’un des aspects remarquables du film est la construction spéciale de la fille, qui n’est pas masculinisée comme les autres filles hawksiennes le seront plus tard. On y trouve la finesse de jeu de Brooks, comparée au jeu excessif de Spike (Mac Laglen), sa beauté et sa finesse de traits stupéfiante, face au visage buriné, à la peau épaisse du marin.

Hawks déclare:
« Je voulais une fille pas comme les autres... J'ai engagé Louise Brooks parce qu'elle... est très sûre d'elle-même, elle est très analytique, très féminine, mais elle sait exactement ce qu'elle veut et comment s'y prendre. Je pourrais l'utiliser aujourd'hui. Elle était très en avance sur son temps, avec cette coiffure... Et c'est une révoltée, elle me plaît, vous savez. J'aime les révoltées... Ce que je n'aime pas ce sont ces petites mijaurées qui essaient d'être jolies et n'ont pas envie d'être distinguées, intelligentes et originales. » [Et, contemplant une photo:] « Voyez comme elle a l'air moderne. C'est vraiment une jolie fille. »

Distribution

  • Victor McLaglen : Spike Madden
  • Robert Armstrong : Salami
  • Louise Brooks : Marie, une fille en France
  • Natalie Joyce : Une fille à Panama
  • Maria Casajuana : Chiquita
  • Leila Hyams : Une femme de marin
  • Elena Jurado : Une fille à Panama
  • Sally Rand : Une fille à Bombay

Fiche technique

  • Titre original : A Girl in Every Port
  • Réalisation : Howard Hawks
  • Scénario : James Kevin McGuinness, Seton I. Miller et Reggie Morris d'après une histoire de Howard Hawks
  • Titres : Malcolm Stuart Boylan
  • Producteur : William Fox pour Fox Film Corporation
  • Photographie : Rudolph J. Bergquist et L. William O'Connell
  • Montage : Ralph Dixon
  • Direction artistique : William S. Darling
  • Format : Noir et blanc - film muet]
  • Durée : 62 minutes
  • Date de sortie : 26 février 1928


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